Apprendre à faire le vide pour en finir avec le toujours plus

Publié le par criseetcerise

9782745932747Le livre commence par un chiffre: un foyer d'aujourd'hui compte 10 000 objets contre 300 au XIXème siècle. Avons-nous besoin de tous ces objets? Correspondent-ils à nos besoins réels ou répondent-ils à des désirs compulsifs? Force est de constater qu'on nous réduit à n'être que de simples débouchés du secteur industriel qui s'évertue à créer de toute pièce des besoins pour vendre. Cette société de consommation s'est d'abord construite sur les ruines de la déconstruction des savoir- faire culturels non marchands. Après, on a progressivement sombré dans la démesure de l'hyper-consommation en passant d'une consommation de nécessité à une frénésie d'accumulation pour se convaincre que possession rime avec bonheur mais aussi pour se donner un contenu identitaire. ( Consommer pour exister et paraître).

La course aux bas prix est un drame auquel chacun d'entre nous participe implicitement. Cet anomalie tarifaire suppose des conditions de production sociales et environnementales déplorables. Le citoyen s'efface alors devant le consommateur qui a pris le pouvoir. Peut-on survivre à cette forme de schyzophrénie? Cette société de l'impatience et de l'immédiateté noie son mal-être et sa frustration dans l'acte d'achat nous enfermant dans notre solitude. Cette société de l'emballement accélère nos vies, notre consommation ( on accumule ), notre rapport au temps ( respecte-on encore la saisonnalité des produits?). Les espaces dévolus à la sur-consommation (les centres commerciaux ) sont le symbole même de l'exclusion sociale. On y croise des êtres tourmentés, pressés, dans l'anonymat le plus complet qui viennent rompre les affres de l'ennui et de l'isolement en consommant ( Achète bon sang, ça ira mieux après!!). Ce monde consumériste engendre l'infantilisation de toute une frange de la population. On donne un pouvoir à l'enfant-consommateur, prescripteur des achats de ses parents. On vise par la publicité à le maintenir dans cet état infantile en le sacralisant dans sa toute puissance alors qu'il faudrait que cet être en construction gagne en autonomie. De même, on enferme beaucoup d'adultes dans « l'adulescence » c'est à dire dans la jouissance immédiate des plaisirs matériels et l'asservissement aux désirs sans cesse stimulés par les dérives industrielles. Cette société, sous couvert d'une transparence malsaine, place sous tutelle la masse des consommateurs en leur fixant un fil à la patte pour tracer chacun de leurs pas, de leurs gestes, de leurs achats. C'est une surveillance mercantile qui peut vite sombrer dans l'intrusion totalitaire ( Big Brother n'est pas loin!!) et qui est une conséquence de l'infantilisation de nos concitoyens. La recherche de la performance conduit la société dans une spirale où le rythme et les exigences qu'elle impose à l'individu le dépasse complètement. Là encore, une symptomatique inaptitude à accepter les limites humaines.

La marchandisation des rapports humains a exclu de fait des valeurs non marchandes arton1199-af48ccomme l'entraide, le partage et la solidarité. Revenons sur le titre du livre « Apprendre à faire le vide », on parle bien d'un apprentissage ou chacun chemine à son rythme pour tenter de vivre en accord avec ses valeurs et le respect des autres et de la planète. Il ne s'agit surtout pas d'un étalage compétitif du type « Plus décroissant que moi tu meurs » pour apparaître comme l'individu  « parfait » qui donnerait la leçon morale aux autres.

Ce cheminement où on comprend que le bonheur ne passe pas par la consommation et l'acquisition de biens prend un peu de temps mais la véritable émancipation se trouve sur ce sentier constructif.

On réapprend à donner un sens éthique à ses achats, à développer des réseaux d'échanges locaux d'entraide et de partage ( Pourquoi ne pas imaginer la mutualisation de certains biens matériels? ).Cette consommation alternative est source de redécouverte de soi-même mais elle est aussi propice à l'enrichissement social par les échanges nombreux que cela peut procurer.

Ce livre ouvre la voie pour tenter de comprendre l'importance de se redonner des limites pour éviter une chute collective dans les méandres de la démesure. Il pousse aussi à exiger un nouveau rapport de force comme le prétend Paul Ariès « entre la gratuité du bon usage et le renchérissement ou l'interdiction de mésusage. »

Pour finir, je ne résiste pas à mettre « la chanson du dimanche » sur le pouvoir d'achat.

 

Antony

 


 

 

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